Tour d’horizon

Il me semble qu’on ne peut pas aborder le Guatemala sans se préparer à développer un autre regard car, si ce pays est riche en perspectives touristiques, en paysages à découvrir, en spectacles visuels chatoyants, cela ne doit pas masquer le drame qu’ il vit depuis des siècles.
Aussi je vous propose un peu d’ histoire.


Un peu d’ histoire

C’ est dans le Nord du pays, dans la province du Péten que se développa
une des civilisations les plus brillantes, la civilisation Maya.

Vers l’ an 1000, cette civilisation au destin énigmatique déclina au profit d’ autres régions, sans que l’on en connaisse la cause.
On sait toutefois qu’elle du se soumettre aux Toltèques puis aux Aztèques venus du nord vers 1300.
A partir du 14eme siècle, les Espagnols envahirent à leur tour ces contrées, se débarrassèrent des Mayas après une année de guerre acharnée.
Ils y exercèrent une tyrannie sanglante, brûlant et pillant des villages, réduisant les indiens à l’ état d’ esclaves et octroyant aux « conquistadores » les terres.
Ajoutons que la presque totalité des documents témoignant de l’avancée culturelle, astrologique, mathématique des Maya fut également détruite, à la demande des missionnaires pour obliger les indigènes à abandonner leurs croyances.
Le Guatemala devint indépendant en 1821, mais ne connut depuis qu’ ‘une succession de dictatures.
Un système démocratique tente de se mettre en place depuis 1945, mais il est constamment remis en cause par des coups d’État militaires.
Ajoutons que des inégalités flagrantes, toujours d’actualité entre les Indiens et les Ladinos (métis d’espagnols et d’indiens), favorisèrent des mouvements de guérilla et des répressions sanglantes de la part de l’armée et d’organisations extrémistes dont on estime que plusieurs dizaines de milliers d’Indiens en firent les frais.
Les « escadrons » de la mort, organisation extrémiste apparue au début des années 1980 a, entre autres, maintenue le pays sous la terreur, en faisant une terre de veuves et d’orphelins.
Il y a aussi le fait que ce pays est riche en possibilités d’exploitation de bananes, de café, ce qui attira des entreprises étrangères, principalement US, avec en corollaire les agissements de la CIA traquant comme toujours les « risques communistes », ce qui conduisit, petit à petit, à repousser les Indiens vers les hautes terres évidement moins exploitables.
Toutes les tentatives pour revenir à plus d’équité, se sont traduites par des coups d’État.
Depuis 1996 la signature d’un cesser- le feu entre la guérilla et le pouvoir redonnent un peu d’espoir, mais l’oligarchie terrienne demeure vigilante.
Un tiers des effectifs militaires a néanmoins déjà été supprimé.
La lecture du livre d’Elysabeth Burgos, “moi, Rigoberta Menchû ” écrit sous la dictée de Rigoberta en 82 à Paris, nous livre toute l’ampleur du drame Guatémaltèque.
Ce qui est extraordinaire c est qu’il s’agit d’une traduction mot à mot qui paraît laborieuse lorsqu’on commence la lecture, mais qui en fait restitue toute l’âme indienne.
Ceci permet de comprendre que les dirigeants de ce pays et leur souhait de voir amnistier les responsables militaires, puis Bill Clinton venu faire un acte de « repentance » en mars 1999, ne peuvent pas imaginer un instant que le passé pourra être rayé d’un simple trait de plume.
Il semble évident qu’une politique d’avenir ne pourra se faire que si le passé est pris en compte, comme un présent absolu : Les disparus sont là, les tortionnaires sont là, les génocidaires également.
Voyez en Argentine, les « femmes de la place de mai »; depuis 30 ans elles se réunissent chaque année pour réclamer leurs disparus ;
“En vie vous les avez emmenés en vie nous les voulons”
Elles savent bien qu’elles ne les reverront jamais, mais elles refusent que le passé soit gommé, elles refusent de plier, donnant part là même de la dignité à leur pays.
Ajoutons que dans les croyances indiennes, un disparu ne peut pas trouver la paix s’il n’est pas enterré selon les coutumes de son peuple et qu’il peut se retourner contre les siens. C’est la toile de fond qu’il convient d’avoir présente lorsque l’on parcourt ce pays.
(sources documentaires : Le Monde Diplomatique-Encyclopédies Universalis
& Encarta, et Miguel Bénasayag)


Alors allons-y!


Entrée au Guatemala.

Nous sommes entrés au Guatemala à La Mésilla, venant des Chiapas au Mexique. Nous avions hésité à passer par le nord-est, depuis Ténosique de Pino Suares, ou, partie en bus, partie en bateau par la rivière, il est possible (c’est organisé) de gagner Bénito Juarez, El Naranjo et atteindre le parc national de Tikal.
De là, les plus courageux (ou les moins fortunés) descendront vers le sud en bus* (merci les pistes) où en avion depuis San Bénito.
* Dernière heure : ce trajet serait désormais facile, en bus de luxe, compagnie Linéa Dorada, service de nuit – départ de Flores 20h – Guatemala City 7h .
Toujours est-il que nous avions eu la mauvaise idée de vouloir louer une voiture et préférions le faire au plus vite.
À la frontière, il n’y a rien d’autre qu’un bureau des douanes, des changeurs de monnaie et un vieux camion ou l’on s’entasse pour gagner la Démocratia (on rêve) à 15 km ou l’on peut prendre le bus pour Huehuetenango.
Les douaniers ne doivent pas trop apprécier les Français car, nous serons les seuls étrangers à devoir acquitter le montant d’un visa !
On se doute pourquoi et on n’a pas à en rougir.
Nous décidons de filer sur Quézalténango louer une voiture.


Que faire avec une auto ?

En fait pas grand-chose car : les routes sont très abîmées et donc dangereuses.
Les rares accès à la mer vous mènent pour ainsi dire nulle part, car Puerto Quetzal n’a rien d’ une carte postale et pour trouver un endroit “touristique” il faut traverser 5 ou 6 km de bidonvilles. Merci.
Vous pouvez donc visiter : les environs de Quézalténango. le lac Atitlan et Solola et son marché, Chichicasténango et son magnifique marché.
Antigua (prévoyez-y 2 à 3 jours, cette ville est magnifique).
Ciudad Guatemala si vous y tenez.
De ce côté-ci, c’est à peu près tout ce que je conseillerais.
Vers l’ouest, la route conduisant de Ciudad de Guatemala à Puerto Barrios est belle, normal, c’est par ce port que le Guatemala s’approvisionne ou exporte ; inconvénient : le nombre de camions au km !
Ne manquez pas le Rio Dulce au bout du Lago de Izabal.
Vous pouvez également vous rendre aux ruines de Copan, au Honduras, en bifurquant vers Chiquimula à Rio Hondo.
C’est à peu près tout, ou alors louez impérativement un 4/4.


Ce que j’ai aimé

les sources chaudes proches de Quézalténango

(j’ ai oublié le nom, mais elles sont dans le Lonely Planet que je n’ ai plus) ; elles sont en altitude, on traverse de très beaux paysages de cultures souvent émergeant de la brume, on peut y louer une chambre et se nourrir.

Le marché de Chichicasténango

Le lac Atitlan, le marché de Solola et la petite ville de San Antonio Palopo, ou, vous pourrez voir et acheter des tissages fabriqués par chaque famille, 8 ou 10 personnes entassées dans de misérables pièces, mais ou l’ accueil est adorable, en particulier celui des enfants qui veulent vous conduire partout.
Laissez-vous faire, c’est un grand moment.

Antigua

À ne manquer sous aucun prétexte.


Le Rio Dulce

Entre le Lago de Izabal et et le golfe du Honduras.
A El Relleno, avant de franchir le pont sur le Rio, demandez à être conduit en bateau chez Suzanna.
C’est une Française qui a créé un port de plaisance dans un bras abrité du Rio, ou viennent des globes-flotteurs du monde entier. Vous y trouverez des chambres sur pilotis superbes avec 2 grands lit, un bon restaurant et club housse.

Faites absolument une balade en bateau sur le Rio.
Louez une bateau à moteur, ça ne manque pas, et faites-vous conduire jusqu’a Livingston, à l’ embouchure du Rio.
(cette ville a été touchée par le cyclone Mitch, raison de plus pour s’y rendre),


C’ est une ville de noirs, amateurs de fumée …

et allez visiter au retour, ou un autre jour, le Castillo de San Felipe.
Je vous laisse découvrir cette “chose”. Prévoyez quelques jours dans ce secteur.


Le site archéologique de Tikal
(1 jour minimum de visite).
On peut coucher à l’entrée du site, mais il me parait préférable de séjourner à San Bénito,
il y a 2 ou 3 hôtels sur le lac, ou à Flores, ville plus touristique, moins tranquille, mais jolie.

Des navettes de bus vers le site sont à votre disposition à San Bénito.

Si vous avez loué un 4/4, vous pourrez “monter” à Tikal par la piste depuis le Rio Dulce,
sinon un bus vous y conduira depuis El Relleno à condition de ne pas craindre les lombalgies.
Le mieux me parait être de prendre l’avion à Ciudad de Guatemala.
En cherchant un peu, vous trouverez des petites compagnies
qui vous transporteront pour un prix acceptable.


Le site de Copan au Honduras.

Si vous êtes en voiture vous pouvez accéder au poste frontière,
50 km environ après Chiquimula, la “route” est fréquentable.
Après le poste frontière, 4/4 exclusivement, sinon il y a une “navette” qui part quand elle a le temps… mais c’ est pour faire monter un peu les enchères.
On paie la douane avec les devises qu’on a. Pas d’angoisses à avoir par là.
Le site vaut vraiment le détour.
On peut y aller en avion depuis Guatemala City.


Ce que je n’ai pas apprécié

Les bords du Pacifique
 Aucunes plages ne vaut le détour.

Quezalténango.

Ville chère et à l’accueil peu sympathique. C’ est une ville d’ étudiants aisés, progénitures vraisemblables de l’oligarchie dominante du pays.
Si cela vous tente, connectez-vous à la liste de diffusion de l’ université, bien sur si vous parlez espagnol !
Si vous passez néanmoins dans ce coin, allez vous balader à la gare routière, pas aux arrêts des bus de riches, celle qui se trouve en dehors de la ville.
C’est plein de ressources en tout genre, surtout pour se rendre dans tous les coins de la région, mais quelle misère !
Les progénitures citées plus haut ne s’y aventurent pas, des fois que le rouge leur colorerait le visage.

Ciudad de Guatemala 
Si c’ est vraiment indispensable.


Ce que j’ai haï 


Chiquimula 


Ce n’est pas tant à cause de la ville, mais des gens.
C’est ce que l’on peut faire de plus méprisant, et pas seulement à l’égard des Indiens, d’arrogant, de violent, de sans gêne. 
Ce sont les qualificatifs qui me manquent pour dire à quel point ces gens m’ont donné la nausée.
Jamais à travers le monde ou je suis passé, je n’avais connu un tel niveau d’abjection.
Il est vrai que ce n’est pas partout que se rassemblent en si grand nombre, trafiquants de drogue et grands propriétaires terriens. Je ne parle que de ceux de ce pays et vous invite à lire le livre de Rigoberta Menchû cité dans la page précédente.
Si, comme moi, vous avez la chance (!) d’être dans cette ville pour l’élection de miss Chiquimula, rendez-vous, pardon, je veux dire, allez dîner au “Las Vegas”, (ça ne s’invente pas).
Là vous pourrez voir sans être vu, puisque personne ne daigne jeter un œil sur vous, une table de notoriétés locales, messieurs endimanchés, mesdames en gants “beurre frais”, prendre l’apéritif avant de gagner l’étage supérieur pour le dîner et, une table à côté, une vingtaine de porte-flingues, assurant la sécurité des premiers.
En sortant dans la rue, vous verrez passer quelques BMW ou autres Mercedes, rouges, jaunes, de toute façon bien visibles, conduite par les fistons des précédents accompagnés de fifilles de “bonne famille”…
Ce que je vous invite à regarder, ce sont les Indiens qu’ils croisent ou dépassent.
Aucun ne lève les yeux vers eux, comme s’ils craignaient que cela passe pour de la provocation.
Quand nous sommes montés ensuite vers Copan, nous avons d’abord vu ce type de comportement lorsque les Indiens (ou les indigènes ?) voyaient notre voiture arriver, mais près de la frontière, des jeunes ont lancé des cailloux sur elle.
Ceci en disait long sur leurs conditions de vie dans ce coin et leur colère trop retenue par la peur.
Pour en finir avec Chiquimula, en rentrant à l’hôtel vers 22 h, plusieurs voitures étaient sur le parking, sono à fond et, lorsque vers minuit, nous avons formulé le souhait de dormir un peu, ce sont les T. V. qui ont repris le relais dans les chambres.
Enfin à 5 h du matin, réveillé en sursaut par des coups de feu, je sors pour constater que 3 clients de l’hôtel s’exercent au tir au revolver à côté du parking !!! Charmants garçons, à qui il valait mieux ne pas faire de réflexion vu leurs regards, si je ne voulais pas prendre de plomb.
J’ai su ce jour-là que je pourrais tuer. 

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